Dr Mendelsohn : Ch11 - L'angine à Steptocoque
Chapitre 11
LE MYTHE DE L'ANGINE A STREPTOCOQUES
Dans la zone tempérée de l'hémisphère Nord, rares sont les enfants qui traversent l'hiver sans faire au moins une angine. Les gorges irritées sont douloureuses et gênantes. Les angines gênent l'enfant pour manger, parler et avaler et troublent même son sommeil, elles produisent donc inévitablement chez lui toutes sortes de plaintes.
Lorsque votre enfant a une angine, votre première réaction sera peut-être d'appeler votre médecin. Si vous suivez cette impulsion, vous entrez dans un processus d intervention médicale. Il est fort probable que votre médecin fasse un prélèvement au niveau de la gorge et prescrive un antibiotique si l'examen bactériologique révèle la présence de streptocoques.
Ce traitement peut raccourcir le cours de la maladie, mais il augmente également les risques pour votre enfant de souffrir d'angine tout le reste de l'hiver, pour des raisons que je vais développer plus loin.
Les médecins ne sont pas forcément responsables des angines, mais ils sont responsables des inquiétudes des parents, car ils entretiennent la crainte d'une infection à streptocoques et des graves conséquences qu'elle peut avoir si on ne la traite pas: néphrite aiguë ou atteinte cardiaque.
Il n'est donc pas surprenant que les parents se précipitent sur le téléphone pour appeler leur médecin quand l'angine de leur enfant leur paraît grave.
Comme parent, vous avez besoin de savoir gérer vos craintes sans recours à une aide professionnelle coûteuse et potentiellement dangereuse.
Vous devez d'abord être conscient que les angines sont le plus souvent causées par des virus pour lesquels la médecine moderne n'a aucun traitement. Les seuls traitements indiqués ne guérissent pas l'angine, mais soulagent uniquement les symptômes et ils sont si simples que les parents peuvent les mettre en œuvre par eux-mêmes, sans formation médicale.
Ensuite, vous devez savoir que le prélèvement - pour chercher la présence de streptocoques - est une perte de temps et d'argent. Il ne peut rien prouver. L'examen clinique, que les parents peuvent faire eux-mêmes, répond à la question d'une manière tout aussi satisfaisante.
Enfin, les risques de rhumatisme articulaire aigu sont extrêmement faibles, même avec une infection à streptocoques. Pendant un quart de siècle, dans ma pratique de pédiatrie où j'ai vu plus de 10.000 patients par an. je n'ai observé qu'un seul cas de rhumatisme articulaire aigu. Le danger de cette maladie n'existe virtuellement pas dans la plupart des populations.
Quelques rares cas sont décrits chez des enfants mal nourris, vivant dans des conditions de promiscuité et de grande pauvreté.
La plupart des angines étant causées par des virus, aucun traitement médical ne se justifie, malgré tout ce que peut vous dire votre médecin. Les défenses naturelles du corps feront leur travail et les symptômes disparaîtront. normalement en trois ou quatre jours.
Plus rarement, les angines sont dues à une infection bactérienne, presque toujours le streptocoque. Cette affection répond, en 24 à 48 heures, à un traitement de pénicilline. Sans traitement, les streptocoques sont détruits par les anticorps circulant dans le sang et ils disparaissent d'habitude en moins d'une semaine; les antibiotiques ne font que raccourcir le processus.
Il existe trois maladies causes d'angines qui justifient les craintes des parents. La première, la plus fréquente, est la mononucléose infectieuse; la deuxième, la diphtérie, était autrefois une maladie très grave, mais elle a pratiquement disparu; la troisième, la leucémie, est relativement rare et c'est la plus effrayante. Ces trois maladies exigent un traitement médical et vous devez consulter rapidement si les indications de diagnostic que je donne plus bas vous font suspecter l'une d'elles. (Je traite également de la mononucléose et de la diphtérie en détail au chapitre 19.)
CAUSES D'ANGINES QUE VOUS POUVEZ CONTRÔLER
Enfin, un nombre étonnamment important d'angines provient de conditions extérieures sur lesquelles vous avez, vous, parent, un contrôle. Elles provoquent une irritation douloureuse des membranes de la gorge. Ce sont principalement la sécheresse de l'air en hiver, les antihistaminiques que vous avez donnés à votre enfant pour un rhume (avec ou sans l'avis de Votre médecin), le fait de fumer ou d'être exposé à la fumée de cigarettes, les pollutions chimiques de l'air dans votre environnement et même le fait de trop crier, qui peut irriter les cordes vocales.
On procède d'habitude par élimination pour diagnostiquer les angines virales. Si les symptômes associés à d'autres causes sont absents et que votre médecin ne peut pas trouver une autre explication. il considère que la maladie est virale et, dans la plupart des cas, son diagnostic est juste.
Aucun traitement n'existe pour les angines virales et votre médecin devrait vous le dire. Certains pourtant au lieu d'admettre leur impuissance, feront un prélèvement et commenceront immédiatement un traitement de pénicilline «au cas où il s'agirait de streptocoques".
La façon la plus simple d'éviter cette situation est de ne pas recourir au médecin si vous n'êtes pas sûr que l'état de votre enfant l'exige. Le début d'une infection virale a pour caractéristique d'être insidieux. Pendant un ou deux jours, les premiers symptômes sont des sentiments vagues de démangeaisons du palais mou, surtout en avalant.
Après un jour ou deux, la douleur de l'angine se développe, accompagnée souvent de sécrétions nasales (d'habitude claires), d'une fièvre discrète, de toux, et de ganglions enflés dans la région du cou. Si les événements se présentent de cette manière, vous pouvez être pratiquement sûr que votre enfant a une angine virale. C'est seulement si les symptômes persistent pendant plus d'une semaine ou si votre enfant présente des difficultés respiratoires qu'il est utile de le montrer à un médecin.
Les infections bactériennes, au contraire, commencent brusquement en quelques heures - plutôt qu'en quelques jours - donnent une fièvre élevée, des ganglions lymphatiques enflés sous la mâchoire et une douleur intense de la gorge. Elles peuvent ne pas être accompagnées de rhume ou de toux, ni par les autres symptômes du simple rhume.
L'ANGINE A STREPTOCOQUES N'EST PAS GRAVE
La plupart des cas d'angine à streptocoques chez les enfants de plus de quatre ans peuvent être diagnostiqués en cherchant ce que les médecins appellent la «triade classique», c'est-à-dire les trois symptômes suivants: présence de pus sur les amygdales et au fond de la gorge, ganglions enflés dans la région du cou et température supérieure à 39,5°.
Le pus se présente sous forme de taches blanches ou jaunâtres ressemblant à du lait caillé, se détachant sur une muqueuse rouge feu. Si votre enfant a moins de quatre ans, il n'est pas possible de faire un diagnostic de streptocoques par l'examen clinique uniquement.
Ce diagnostic peut être fait par un prélèvement au niveau de la gorge, mais il n'y a aucune raison de le faire, car les enfants de moins de quatre ans ne sont de toute manière pas sujets au rhumatisme articulaire aigu (pour des raisons immunologiques).
Si l'angine de votre enfant persiste au-delà d'une semaine, dépassant le cours normal d'une infection virale ou bactérienne commune, montrez-le à votre médecin. Il s'agit d'une simple précaution pour vous assurer qu'il n'est pas victime d'une mononucléose infectieuse ou d'une leucémie, dont le diagnostic se fait par une prise de sang.
En ne montrant pas votre enfant au médecin la première semaine, vous n'augmentez aucunement les risques car, en début d'angine, il ne pratiquerait pas ces tests et il aurait raison. Le traitement de la mononucléose est d'ailleurs simplement le repos, dont votre enfant devrait de toute façon bénéficier; un diagnostic précoce n'est donc pas déterminant.
La leucémie est si rare qu'il n'est pas conseillé de la rechercher méthodiquement et les risques de diphtérie sont encore plus faibles. S'il s'agit d'une diphtérie, vous vous en apercevrez quand l'angine se compliquera de difficultés respiratoires sérieuses. En l'absence de ces symptômes, votre médecin ne pensera pas non plus à la diphtérie, dont il n'a probablement jamais vu un seul cas.
Les angines produites par l'environnement seront résolues par votre propre bon sens. Si l'angine de votre enfant n'est pas accompagnée de fièvre, de ganglions, de pus ou d'autres symptômes, pensez en premier lieu à la sécheresse de l'air. Pendant l'hiver dans les climats froids, l'humidité moyenne dans les maisons est d'environ 15%.
Vous pouvez mieux comprendre la signification de ce chiffre quand vous savez que l'humidité normale au Sahara est supérieure: 18%! Si la sécheresse de l'air pose un problème à votre enfant, dépensez votre argent pour un bon humidificateur et non pas pour des soins médicaux. Le même raisonnement s'applique aux autres causes d'angines dues à l'environnement.
PRÉLÈVEMENTS, PÉNICILLINE ET ANGINE A STREPTOCOQUES
Les parents, les enseignants et le public en général ont été habitués, par les médecins, à croire que l'enfant souffrant d'une infection à streptocoques non traitée court un risque grave de contracter un rhumatisme articulaire aigu.
Cette maladie est jugée préoccupante principalement à cause de la possibilité d'une atteinte cardiaque. Lorsqu'un pédiatre reçoit un enfant souffrant d'une angine, il annonce aux parents qu'il va faire un prélèvement. Il peut le justifier en invoquant le risque de rhumatisme articulaire aigu, mais il ne vous dira pas pourquoi cet examen est généralement inutile.
Il ne vous dira pas, par exemple, que l'angine est très probablement causée par un virus et que faire un prélèvement est inutile si la « triade classique » n'est pas présente et s'il n'existe aucune indication clinique de la présence du streptocoque.
Même si l'examen est positif, cela ne veut pas dire à tous les coups que votre enfant a une infection à streptocoques. 20% des enfants scolarisés, en parfaite santé, sont porteurs de streptocoques dans la gorge tout au long de l'hiver, mais ne développent pas la maladie en raison de leur immunité naturelle.
Votre médecin ne vous dira pas non plus que, dans les meilleures conditions, 85% seulement des infections à streptocoques sont identifiées par les prélèvements et que, quand l'analyse n'est pas faite dans un laboratoire qualifié, mais au cabinet du médecin, le pourcentage tombe en moyenne à 50%.
Le personnel exécutant le travail d'analyse dans les cabinets des médecins n'a souvent pas de formation, ni d'expérience suffisante, et n'a pas non plus assez d'occasions de pratiquer les tests.
Votre médecin ne vous dira certainement pas non plus que, bien que l'utilisation de la pénicilline puisse raccourcir la maladie de trois ou quatre jours, elle risque également de favoriser les récidives d'infection tout au long de l'hiver. Les antibiotiques font disparaître les streptocoques, mais empêchent les anticorps naturels de se développer.
Si l'infection n'est pas traitée, mais qu'on lui laisse suivre son cours, l'organisme va produire des anticorps qui continueront à protéger l'enfant contre des réinfections pendant le reste de l'hiver. C'est en fait l'action de la pénicilline contre les anticorps qui la rend efficace dans la prévention du rhumatisme articulaire aigu.
La conséquence du traitement antibiotique est la suivante: si un enfant subit un prélèvement et un traitement de pénicilline au début de l'hiver ses amygdales seront ensuite la cible du bâtonnet à prélèvement tout au long des mois à venir. Si l'un de vos enfants a fait ainsi angine sur angine et a été traité tout au long d'un hiver, souffrant d'angines à répétition toutes traitées, le réel coupable est le traitement plutôt que le microbe.
Votre médecin vous demandera probablement si votre enfant est allergique à la pénicilline, la question lui étant inspirée par la crainte d'un procès. En revanche, il passera sous silence les conséquences possibles d'une allergie au médicament. La pénicilline peut donnes des diarrhées, des éruptions cutanées et. très rarement, des chocs anaphylactiques (réaction allergique généralisée), parfois mortels.
Si votre enfant reçoit de la pénicilline pour la première fois, assurez-vous que votre médecin en est conscient et qu'il le surveille attentivement, guettant toute réaction pouvant présager d'un choc fatal.
Rappelez-vous également que l'efficacité de la pénicilline est assurée dans le traitement des streptocoques, mais que son utilisation irréfléchie et inutile peut avoir une influence sur son efficacité dans le cas d'agressions ultérieures par d'autres bactéries, plus dangereuses.
Comme je l'ai expliqué plus tôt, le patient peut développer des souches de bactéries résistantes à la pénicilline et le médicament ne sera plus efficace quand on en aura vraiment besoin pour sauver une vie.
Si votre médecin prescrit de la pénicilline orale, il saura peut-être vous mettre en garde et vous dire que ce traitement ne sera pas efficace, en prévention du rhumatisme articulaire aigu, si l'enfant ne le prend pas très régulièrement toutes les quatre heures pendant dix jours. Les preuves sont là, cependant, que ce conseil n'est généralement pas suivi.
Il est facile de comprendre pourquoi. L'antibiotique soulage le symptôme de l'angine en quelques jours, ce que Mère Nature aurait également probablement fait, et les parents pensent alors que le médicament a agi. Cela est vrai quand on ne pense qu'à l'angine, mais seul le traitement complet protègera l'enfant contre le rhumatisme articulaire aigus.
Les parents qui réussissent à faire prendre religieusement à leur enfant son médicament toutes les quatre heures, pendant huit jours, alors qu'il ne se sent plus du tout malade, possèdent une détermination remarquable.
Des études confirmées ont montré que lors de prescriptions de pénicilline, moins de 50% des traitements sont suivis correctement. Cela signifie simplement que, dans plus de la moitié des cas, le patient ne prend pas la pénicilline assez longtemps pour prévenir la maladie pour laquelle elle est donnée, rhumatisme articulaire aigu et non l'angine à streptocoques.
POUR LA PLUPART DES ENFANTS L' ATTEINTE CARDIAQUE RHUMATISMALE N'EST PAS UNE MENACE
Si le danger du rhumatisme articulaire aigu était réel. il serait grave de ne pas suivre les instructions du médecin. Mais ce danger ne guette que les enfants à très haut risque: enfants de milieux pauvres qui ont le moins de chances d'être vus par des médecins et, lorsque c'est le cas, le moins de chances également de prendre leurs médicaments aussi longtemps qu'ils le devraient.
Cependant, bien que le rhumatisme articulaire aigu ait à l'évidence disparu, sauf dans les classes les plus défavorisées, les médecins informent rarement leurs patients de l'insignifiance du risque.
On laisse les parents penser que le rhumatisme articulaire aigu et ses problèmes cardiaques irréversibles sont un danger imminent, menaçant chaque enfant souffrant d'une angine, alors que la simple logique, comme les statistiques, montrent le contraire.
Pratiquement toutes les études sur les cas de rhumatisme articulaire aigu consécutifs à l'angine ont été faites dans des populations « fermées» (bases militaires et orphelinats).
On sait que, dans ces circonstances, l'épidémiologie n'est pas la même que dans les autres populations et, pourtant, ces résultats ont été utilisés pour justifier le traitement de millions d'enfants afin de prévenir une maladie dont le risque n'existe pratiquement pas.
Il est légitime de se demander si les risques de ce traitement ne dépassent pas ceux de la maladie en question. Les médecins n'hésitent pas à parler aux parents des dangers du rhumatisme articulaire aigu, mais je n'en connais pas beaucoup qui leur parlent du risque du traitement qu'ils prescrivent.
Si le rhumatisme articulaire aigu constituait un danger sérieux, il serait logique que de nombreux cas se présentent dans une ville aussi grande et aussi peuplée que New York, où tant d'habitants vivent dans des conditions de pauvreté.
Entre 1970 et 1977, seulement 57 cas de rhumatisme articulaire aigu ont été soignés au fameux hôpital Bellevue de New York et pas un seul cas n'a été signalé en 1978, année la plus récente pour laquelle je possède les chiffres.
Si on les questionne, les médecins reconnaîtront que le rhumatisme articulaire aigu est en train de disparaître. mais ils ont tendance à attribuer ce déclin à l'utilisation de la pénicilline.
Cet argument ne vaut rien parce que la maladie a commencé à régresser bien avant l'introduction de la pénicilline. Il y a 25 ans, à Chicago, on a tenté d'enregistrer les cas de rhumatisme articulaire aigu; tous les médecins devaient déclarer ceux qu'ils traitaient.
Cet effort fut abandonné, car aucun cas ne se présenta dans les quartiers aisés de Chicago; les seuls cas déclarés venaient du centre de la ville habités par les familles les plus pauvres.
Des études ont montré que l'incidence du rhumatisme articulaire aigu est proportionnel à la densité des enfants par chambre, ce qui explique probablement les résultats des études faites dans des bases militaires ou des orphelinats. Le rhumatisme articulaire aigu est donc une maladie socio-économique et il est peu probable que l'utilisation de la pénicilline puisse être efficace, même dans les classes défavorisées.
L'efficacité de la pénicilline varie en effet selon l'état nutritionnel du patient, or une bonne alimentation ne va pas de pair avec la pauvreté.
Il est clair que le nombre de cas diagnostiqués est en diminution, mais on ne sait pas, en fait, si la maladie a vraiment été, dans le passé, un réel danger. Une étude des cas diagnostiqués il y a 40 ans a révélé que 90% constituaient de faux diagnostics en raison du non-respect des critères classiques.
9 victimes présumées sur 10 n'avaient donc pas cette maladie. Il est faux, par conséquent, de dire que le rhumatisme articulaire aigu n'est plus dangereux car, en fait, il n'a jamais été dangereux. Ceux chez qui on en a fait le diagnostic il y a plusieurs années et qui s'en inquiètent encore aujourd'hui seront contents de l'apprendre.
Voici une dernière question pour votre médecin: si on admet que 15 à 50% des angines à streptocoques ne sont pas diagnostiquées, donc pas traitées, et que la moitié des malades traités n'en tirent aucun bénéfice, car ils ne suivent pas le traitement jusqu'au bout, où sont donc passés tous ceux qui souffrent de rhumatisme articulaire aigu après une angine?
TROIS OPINIONS SUR LES STREPTOCOQUES
Les médecins se divisent principalement en deux camps pour traiter les angines à streptocoques. Il en existe également un troisième, mis à l'écart, auquel appartiennent quelques-uns d'entre nous.
Un groupe de médecins pense qu'il faut administrer de la pénicilline immédiatement dans tous les cas d'angine, sans attendre le résultat de l'examen. Ils font remarquer avec raison que, si la pénicilline n'est pas donnée dans les premières 48 à 72 heures après le début symptômes, elle sera probablement inutile pour le rhumatisme articulaire aigu.
Comme les symptômes ont généralement été présents depuis quelque temps au moment où on fait le prélèvement, attendre 24 ou heures avant d'administrer la pénicilline risque de la rendre inefficace (ces 24 ou 48 heures sont nécessaires
pour obtenir le résultat de la culture).
Le deuxième groupe pense qu'il ne faut pas donner de pénicilline avant de recevoir les résultats de la culture Ils insistent sur les risques de la pénicilline, sur les dangers d'une utilisation inappropriée et sur le fait qu'on ne devrait pas faire dépenser peut-être inutilement l'argent aux gens.
Le troisième camp, dans lequel je me place, pense que le prélèvement aussi bien que les antibiotiques sont à éviter, car les dangers du traitement sont bien plus importants que les dangers virtuels d'une infection à streptocoques.
Ma position n'est que le résultat de mon expérience et de mes observations pendant un quart de siècle. A la fin de mes études, je me suis établi dans un quartier aisé de Chicago.
Mon partenaire, le docteur Ralf Kunstadter, était un médecin expérimenté et consciencieux. Je fus surpris de voir qu'il faisait rarement des prélèvements au niveau de la gorge et lorsque je lui demandai pourquoi, il me dit qu'il les considérait comme une perte de temps.
Le docteur Kunstadter avait été formé vingt ans avant, quand les écoles de médecine n'avaient pas encore totalement abandonné Mère Nature. Mais j'étais imbu de tout ce qu'on m'avait appris et je fis des prélèvements pendant un certain temps.
Quand je découvris que mes résultats n'étaient pas meilleurs que ceux de mon collègue, je finis par les abandonner, en évitant ainsi à mes patients ennuis et dépenses. Comme je l'ai dit plus haut, sur les 15O.0OO patients que nous avons vus pendant quinze ans de pratique, nous n'avons eu affaire qu'à un cas de rhumatisme articulaire aigu.
Les risques que nous aurions fait courir à tous les enfants présentant des angines en les traitant à la pénicilline, pour éviter ce seul cas, auraient constitué un mauvais calcul.
POURQUOI FAUT-IL ÉVITER L'ABLATION DES AMYGDALES ?
Je finirai en parlant des amygdales de votre enfant, destinées à intercepter les bactéries entrant dans sa gorge et qui peuvent s'infecter lorsque son corps réagit aux affections bactériennes. Méfiez-vous lorsque le médecin essaye de vous persuader que l'infection des amygdales justifie l'ablation: c'est rarement vrai.
Les ablations d'amygdales ont fait vivre des générations de chirurgiens et de pédiatres. Dans les années 30, les médecins en pratiquaient près de 2 millions par an. Peu d'enfants atteignaient l'adolescence avec leurs amygdales indemnes, malgré l'absence de justifications médicales. Pour des millions d'enfants, les conséquences de cette chirurgie inutile ont été un traumatisme émotionnel, la perte de leurs défenses naturelles contre les maladies et, parfois même, la mort.
Les seules indications absolues de l'ablation des amygdales ou des végétations sont le cancer ou une obstruction asphyxiante des voies respiratoires. Cependant, depuis des décennies, les médecins les pratiquent couramment en justifiant ce comportement irrationnel par un risque - inexistant - de perte de l'ouïe ou d'angines à répétition.
La tendance des pédiatres et des chirurgiens à enlever les amygdales sans raison à été démontrée dans une étude expérimentale faite dans les années 40. 1000 enfants ont été examinés par un groupe de pédiatres et, dans 611 cas, ils recommandèrent d'enlever les amygdales.
Les 389 patients restants furent montrés à un autre groupe de pédiatres, qui conseillèrent à 174 d'entre eux de subir l'opération. Il ne restait plus que 215 cas, qu'un troisième groupe de pédiatres fut invité à examiner. Bien qu'ils aient déjà été vus par deux autres médecins, l'amygdalectomie fut conseillée pour 89 cas. Si l'on avait continué cette farce, la chirurgie aurait probablement été recommandée aux 126 rescapés!
Les amygdales et les végétations contiennent du tissu lymphatique, siège de l'activité immunologique de l'organisme. Étant les agents de défense contre les bactéries qui entrent dans la gorge, il est inévitable qu'elles s'infectent, grossissent et s'enflamment.
Si on les enlève, on prive votre enfant de sa première ligne de défense contre l'infection et la responsabilité de cette défense repose alors sur les ganglions de son cou. La compétence immunologique de son corps est diminuée, ce qui peut augmenter le risque de maladie de Hodgkin.
Les médias ont critiqué l'ablation systématique des amygdales et, depuis, les parents se montrant plus réticents, le nombre des opérations a été divisé par trois, ce qui est encore trop.
Je pense que moins d'un enfant sur 10.000 peut tirer un bénéfice de cette chirurgie, alors que des centaines de milliers d'opérations sont encore pratiquées chaque année, avec 100 à 300 morts annuelles et des complications dans 16 cas sur 1000.
J'en ai conclu depuis longtemps que la seule faute de Dieu est d'avoir placé les amygdales dans un lieu d'accès si facile au bistouri du chirurgien.
A moins que les amygdales de votre enfant ne soient si enflées qu'elles l'empêchent de respirer, ne permettez pas à votre médecin de les lui enlever sans motifs convaincants. Et, même dans ces cas-là, je vous recommanderais de demander un second avis.